Publié le 04/03/2024

Bref, j'ai voulu vendre des œufs...

L'idylle champêtre

Tout a débuté comme un rêve bucolique : 35 poules pondeuses gambadant joyeusement dans ma microferme agroécologique, offrant au monde leurs précieux œufs frais. Un tableau idyllique, n'est-ce pas ?

Le cauchemar administratif

Malheureusement, la réalité administrative s'est rapidement imposée, transformant ce rêve en un véritable parcours du combattant.

Poules industrielles : l'uniformisation du goût et de la génétique

Dès le départ, j'ai dû me résoudre à dire adieu aux poules mixtes, ces charmantes volailles rustiques qui donnent de vrais oeufs fermiers et du sens aux projets comme le mien. Seules les "professionnelles" étaient autorisées. Je ne savais même pas qu’il y avait des poules professionnelles! Ces pondeuses industrielles sont sélectionnées et croisées pour leur productivité, au détriment de la diversité et du goût. (Cf. Arrêté royal du 25 juin 2018 relatif à l'identification et à l'enregistrement des volailles et des lapins)

Paperasserie infernale : un labyrinthe kafkaïen

Et que dire de la paperasserie infernale ! Formulaire B03, numéro de troupeau, marquage des œufs, déclarations à l'ARSIA et à l'AFSCA, registre d'exploitation, registre de production... J'avais l'impression de devenir expert-comptable plutôt que micro-agricultrice ! (Cf. Arrêté royal du 25 juin 2018 relatif à l'identification et à l'enregistrement des volailles et des lapins, Art. 7-12)

Tracasseries sanitaires : l'hygiénisme à outrance

Entre la visite biosanitaire vétérinaire annuelle, la traçabilité des œufs, les analyses régulières de fientes et j’en passe, l'hygiénisme poussé à l'extrême semblait avoir pris le pas sur le bon sens. Tout cela pour seulement 35 poules et environ 150 œufs par semaine vendus en hyper-local ! Même si je suis convaincue par la nécessité d'un suivi sanitaire, l’énergie est-elle placée au bon endroit ? Les différentes crises sanitaires n'avaient pas, me semble-t-il, pour origine les petites fermes locales, mais plutôt les grosses machines tirées par les lobbies.

Ah j'oubliais...

J'allais oublier la nécessité d'obtenir une carte d'ambulant pour vendre sur un marché à 3 km de chez moi, sans parler naturellement des obligations fiscales (et autres) inhérentes au commerce... La liste des contraintes s'allongeait, décourageant même les plus motivés. Mon rêve de proposer des œufs frais et locaux se transformait en un véritable cauchemar sans nom.

Abdication amère : un système à bout de souffle

Finalement, j'ai décidé d'abandonner ce projet, avec un goût amer dans l'omelette et la frustration comme seule compagnie. À quel prix aurais-je dû vendre mes œufs pour compenser cette perte d'énergie absurde ?

Un combat nécessaire : vers une agriculture humaine et raisonnée

Je voudrais profiter de cet article pour tirer mon chapeau à tous ceux qui se battent avec ces obligations tous les jours. Parce que malgré tout, au-delà des tracasseries administratives, la passion, le plaisir de travailler la terre et de proposer des produits sains et locaux prend encore le pas sur le reste.

Un appel à l'action : ensemble, changeons les choses

Je continuerai à pester contre l'absurdité du système. Un système qui autorise des produits qui nous tuent à petites doses chaque jour, dit promouvoir les projets agricoles locaux et diversifiés, mais qui noie par sa lourdeur les initiatives aux intentions les plus nobles. Je continuerai aussi à défendre une agriculture à taille humaine, locale et de qualité, respectueuse de l'environnement et du bien-être animal, mais aussi des agriculteurs. Je suis plus motivée que jamais à faire de notre microferme un projet qui fait sens. J'espère que mon témoignage vous inspirera à la réflexion, car c'est ensemble que nous pouvons changer les choses.

Bref, j'ai voulu vendre des œufs...

Sources :

Arrêté royal du 25 juin 2018 relatif à l'identification et à l'enregistrement des volailles et des lapins